Grande libellule de 70 à 75mm de longueur, au corps vert foncé métallique, marqué de tâches jaunes sur le thorax et l’abdomen. Ses yeux verts brillants se touchent en un seul point comme chez les cordulidés et les cordulegasters auxquels elle ressemble beaucoup. Elle est le seul représentant de la famille des macromidés en France. Espèce typique des zones calmes et ombragées des rivières méridionales, elle fréquente également les retenues implantées sur les cours d’eau et parfois certains ruisseaux possédant des vasques suffisamment profondes. Les adultes chassent dans les milieux ensoleillés, parfois assez loin des zones de reproduction. C’est généralement là que les couples s’apparient. Les mâles patrouillant le long des rives sont très agressifs vis à vis des autres odonates. Les femelles pondent rapidement à la surface des eaux calmes. La vie larvaire dure 2 ans, dans les sédiments ou dans le chevelu racinaire immergé des rivières très ombragées. Espèce de répartition très limitée, présente essentiellement dans le sud-ouest de la France (Midi-Pyrénées, nord Aquitaine, sud de Poitou-Charentes, Languedoc-Roussillon, Ardèche) et de façon localisée en Espagne et au Portugal. En Midi-Pyrénées, elle n’est présente que dans le nord et le nord-est de la région, essentiellement sur le cours du Tarn en amont d’Albi, mais aussi sur l’Aveyron, le Viaur, le Lot et le Célé. Les principales menaces identifiées sont la pollution, la destruction ou la dégradation de la ripisylve. Elle semble souffrir aussi de la présence d’écrevisses allochtones.
Menaces d’origine naturelle
Durant l’émergence, le vent, la pluie, la grêle peuvent totalement décimer la cohorte d’une journée. L’impact des gouttes suffit à faire tomber un insecte en cours de métamorphose. Le vent peut empêcher les libellules d’étaler correctement leurs ailes. Dans le meilleur des cas, les insectes voleront avec un handicap. Dans le pire, ils ne pourront pas décoller. Il arrive que le froid empêche les libellules de terminer leur émergence. Les insectes, à bout de force, restent alors prisonniers de l’exuvie où leur cuticule et leurs ailes se solidifient. Durant la période de vol, des orages, de longues périodes de froid et de pluie peuvent réduire sensiblement les effectifs de libellules. A l’inverse, une sècheresse durable peut dessécher de nombreux sites de reproduction où réchauffer l’eau à un tel point que cette température dépasse le seuil admissible par les espèces euro sibériennes notamment, qui apprécient plutôt les eaux fraîches. L’assèchement désormais chronique de certains cours d’eau compromet localement la survie de plusieurs espèces. En fin de saison, les premières gelées sonnent le glas de nombreuses espèces.
• Les parasites : Les libellules sont soumises à la pression des parasites à tous leurs stades de développement. De petits hyménoptères, essentiellement des Chalcidoïdés, pondent directement dans les œufs de libellules à ponte endophytique, que leurs larves dévorent. Ces espèces sont qualifiées de parasitoïdes car leur infestation se traduit invariablement par la mort de l’espèce hôte. Certains de ces parasites sont d’ailleurs à leur tour parasités par des hyménoptères eulophidés qui sont donc des hyperparasitoïdes, soit des parasitoïdes de parasitoïdes. Larves et adultes sont aussi porteurs de parasites internes tels que des grégarines ou des trématodes. Certains parasites passent d’hôte en hôte pour atteindre leur complet développement. Certains doivent avoir trois hôtes différents passant d’un mollusque aquatique à une larve d’odonate puis à un poisson, une grenouille ou un oiseau. La transmission du parasite se fait par ingestion de la libellule à l’état larvaire ou imaginal.
• Prédateurs : Malheureusement pour les odonates, la liste de leurs prédateurs est longue et il nous est impossible ici d’en dresser l’inventaire complet. Les hydracariens consomment les œufs des espèces à ponte exophytique et peuvent, semble-t-il, avoir un impact certain sur la productivité des libellules (Proctor & Pritchard, 1989). Il est par ailleurs fréquent de voir des poissons se rassembler sous les sites de ponte pour collecter les œufs, à mesure que les femelles les déposent. Les larves sont souvent pré datées par des coléoptères et des hémiptères aquatiques, mais les odonates sont sans pitié les uns envers les autres. Les poissons, les amphibiens, certains reptiles mais aussi des oiseaux (canards, limicoles, martin-pêcheur, aigrettes, cigognes) en consomment abondamment. Depuis quelques années, le principal prédateur des libellules est devenu l’Écrevisse de Louisiane Procambarus clarkii, une espèce américaine qui détruit totalement les hydro systèmes.
Ecologie et biologie
Le Cordulie splendide est une espèce qui colonise la plupart des rivières de plaine et des collines, dès l’instant où l’eau est calme, assez profonde et permanente et les rives bordées d’une ripisylve bien stratifiée. Elle ne tolère qu’une pollution très faible des eaux. Les populations larvaires se rencontrent au niveau des secteurs profonds sur substrat limoneux à organique à l’aplomb des berges, où elles chassent à l’affût pendant la nuit. Le stade larvaire est connu pour durer de deux à trois ans. Les émergences d’imagos sont, pour le sud de la France, échelonnées, lors de conditions favorables, de la fin mai à juin. La métamorphose à lieu sur un support ombragé (larve lucifuge ?), en rétroversion complète (dos de la larve face au sol), parfois en position assez élevé au-dessus de l’eau (3-4 m) : tronc, paroi rocheuse, etc. Les individus juvéniles ont une période de maturation d’une quinzaine de jours pendant lesquels ils s’éloignent des habitats aquatiques. Les populations adultes matures se tiennent non loin des habitats larvaires aquatiques, en ce qui concerne les mâles surtout. En effet, ceux-ci, bien que non territoriaux, parcourent inlassablement des secteurs linéaires, pouvant atteindre 1 kilomètre, à la recherche de femelles. Ces dernières, très difficiles à observer en dehors de la ponte, se tiennent en retrait des eaux, au niveau de lisières et friches ensoleillées.